Читаем Dragons d'une aube de printemps полностью

Le sol céda sous les pieds de Tanis. Sa planche de salut fut une colonne qu’il agrippa à bras-le-corps. Puis les ténèbres l’engloutirent.

Il m’a trahie !

La colère de la Reine Noire s’était déclenchée avec une violence inouïe. Tanis crut que son crâne allait éclater. Les ténèbres se firent encore plus denses ; Takhisis, sentant le danger, cherchait désespérément à retenir la porte qui risquait de se refermer sur elle, la séparant du monde.

Toutes les lumières s’éteignirent. La nuit étendit ses ailes sur la Salle du Conseil.

Autour de Tanis, les draconiens trébuchaient et s’affalaient. On entendait les officiers crier des ordres pour enrayer la confusion. Ils tentaient d’endiguer la panique des draconiens, abandonnés par leur Reine. La voix aiguë de Kitiara s’éleva au-dessus du tumulte, puis mourut.

Un craquement d’une ampleur singulière, suivi de cris horrifiés, avertit Tanis que l’édifice allait s’effondrer.

— Laurana ! hurla-t-il.

Luttant pour rester debout malgré l’obscurité, il titubait, butant contre les obstacles. Violemment projeté sur le sol, il fut piétiné par les draconiens. Puis il perçut le bruit d’épées qui s’entrechoquent, et la voix de Kitiara rassemblant sa garde.

Perclus de douleur, il réussit à se remettre debout. Rageusement, il repoussa à coups de pied un assaillant armé d’une lance.

Soudain il y eut un répit. Chacun leva les yeux vers l’ombre immense et ténébreuse. Des chuchotements terrifiés montèrent de la foule des draconiens, soudain silencieux. Takhisis apparut au-dessus de la foule sous sa forme de chair.

Son corps gigantesque scintillait d’une multitude de couleurs si diverses, si changeantes, si aveuglantes, qu’aucun esprit humain ne pouvait se faire une image de Sa Noire Majesté, la Reine de Toutes les Couleurs et d’Aucune. Sous des yeux flamboyants faits pour consumer le monde, ses cinq têtes ouvraient largement leurs gueules.

Tout est perdu, se dit Tanis, au désespoir. C’est l’instant ultime, celui de sa victoire. Nous avons échoué.

Les cinq têtes poussèrent des rugissements de triomphe… Le dôme de la salle éclata.

Le temple d’Istar se tordit comme un corps et se déforma pour reprendre sa structure d’origine.

Celle qu’il avait avant que les Ténèbres le dénaturent.

L’ombre qui pesait sur la salle s’estompa. Les rayons argentés de Solinari, que les nains appellent « Le Chandelier de la Nuit » achevèrent de la disperser.

<p>12</p><p>Remboursement des dettes</p>

— À présent, mon frère, je vais te dire adieu.

Raistlin sortit un petit globe des plis de sa robe noire. C’était un orbe draconien.

Caramon sentit ses forces l’abandonner. Il tâta son bandage et le trouva trempé de sang. La tête lui tournait ; la lumière du bâton de son frère dansait devant ses yeux. À travers une sorte de brouillard, il entendit les draconiens se ruer vers lui. Le sol trembla sous ses pieds.

— Tue-moi, Raistlin.

Caramon posa sur son frère un regard sans expression. Les yeux mi-clos, Raistlin garda le silence.

— Ne me laisse pas tomber entre leurs mains. Mets fin à mes jours rapidement, tu me dois cela…

Les yeux dorés s’allumèrent.

— Je te le dois ! siffla Raistlin. Moi, te devoir quelque chose ? répéta-t-il d’une voix étranglée.

Furieux, il se tourna vers les draconiens et tendit la main. Des éclairs jaillis de ses doigts les frappèrent. Surpris par la rapidité de l’attaque, ils tombèrent dans l’eau, qui se mit à bouillonner de sang vert. Les petits dragons, devenus cannibales, fondirent sur leurs cousins.

Trop faible pour réagir, Caramon regarda la scène sans s’émouvoir. Le fracas des épées s’amplifia, les voix se firent plus criardes. Puis les eaux l’engloutirent…

Mais il sentit bientôt la terre ferme sous ses bottes. Ses paupières battirent. Il était assis sur un rocher, à côté de son frère qui brandissait son bâton.

— Raist ! s’exclama Caramon, des larmes plein les yeux.

Il tendit la main pour toucher son jumeau.

Froidement, Raistlin écarta son bras.

— Sache bien, Caramon, dit-il d’une voix glaciale, que c’est la dernière fois que je te sauve la vie. Maintenant, nous sommes quittes. Je ne te dois plus rien.

— Raist, je n’ai jamais pensé…

Le mage n’écoutait pas.

— Peux-tu te tenir debout ? demanda-t-il.

— Je… je pense que ça ira, répondit Caramon, hésitant. Peux-tu… Est-il possible d’éloigner ce machin ? fit-il en montrant l’orbe draconien.

— C’est possible, mais tu n’apprécierais pas particulièrement le voyage, cher frère. D’autre part, aurais-tu oublié ceux qui t’accompagnent ?

— Tika ! Tass ! cria Caramon, s’aidant des rochers pour se mettre debout. Et Tanis ! Qu’est-il devenu…

— Tanis suit son propre chemin. Envers lui, j’ai payé ma dette au centuple ! Mais peut-être puis-je m’acquitter de ce que je dois aux autres…

Des cris et des vociférations se firent entendre au bout du tunnel. Une troupe de draconiens surgit des eaux noires, obéissant à l’ordre de leur Reine.

Caramon mit la main à son épée, mais son frère l’arrêta d’un geste.

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Андрей Боярский

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